samedi 30 août 2025

Salaire

Les mots « salaire » et « salarié » viennent directement du latin « salarium », la rémunération en nature des légionnaires romains qui recevaient des rations de sel. On retrouve dans ce terme la racine latine « sal » qui deviendra notre « sel » avec ses dérivés : saler, salaison, salière, saline, saloir … Par la suite le terme est resté pour la rétribution en argent.

L’habitude de payer avec du sel vient de l’Egypte antique : c’est ce que recevaient les ouvriers du temps des pyramides. Ce condiment était important pour eux, il permettait de donner de la saveur aux aliments mais aussi de les conserver, et de plus il pouvait servir de désinfectant pour soigner les affections cutanées. A une époque, vu ses nombreuses vertus, on l’appelait « l’or blanc ».

Aujourd’hui le salaire c’est un versement électronique ou en liquide : des billets de banque et des pièces de monnaie qu’on disait autrefois « sonnantes et trébuchantes ». Allusion au trébuchet (voir illustration), petite balance qui servait à peser les espèces anciennes (écu, denier, louis, thaler…) pour déterminer leur teneur en métal précieux (or ou argent) et ainsi leur valeur.

Autant savoir.

 

vendredi 29 août 2025

Le « beau tétin » de Clément Marot (Autant savoir)

Hormis quelques philologues, plus personne ne lit les poèmes de Clément Marot (1496-1544) et pourtant il est considéré comme le premier poète moderne de la jeune langue française, un précurseur de La Pléiade (du Bellay, Ronsard…).

Il y a tout de même un qui est resté, un texte coquin qui a amusé et fait rire pas mal de générations. Le voici in extenso ci -dessous avec l’orthographe et les tournures de l’époque :

« Tetin refaict, plus blanc qu’un œuf, /Tetin de satin blanc tout neuf,
Tetin qui fait honte à la rose, / Tetin plus beau que nulle chose ;
Tetin dur, non pas Tetin, voyre, / Mais petite boule d’Ivoire,
Au milieu duquel est assise/ Une fraize ou une cerise,
Que nul ne voit, ne touche aussi, / Mais je gaige qu’il est ainsi.
Tetin donc au petit bout rouge / Tetin qui jamais ne se bouge,
Soit pour venir, soit pour aller, / Soit pour courir, soit pour baller.
Tetin gauche, tetin mignon, / Tousjours loing de son compaignon,
Tetin qui porte temoignaige / Du demourant du personnage.
Quand on te voit il vient à mainctz / Une envie dedans les mains
De te taster, de te tenir ; / Mais il se faut bien contenir
D’en approcher, bon gré ma vie, / Car il viendroit une aultre envie.
O tetin ni grand ni petit, / Tetin meur, tetin d’appetit,
Tetin qui nuict et jour criez / Mariez moy tost, mariez !
Tetin qui t’enfles, et repoulses / Ton gorgerin de deux bons poulses,
A bon droict heureux on dira / Celluy qui de laict t’emplira,
Faisant d’un tetin de pucelle / Tetin de femme entiere et belle »

 

Clément Marot est aussi à l’origine d’une règle grammaticale, casse-tête des écoliers, et bien malmenée aujourd’hui : l’accord du participe passé qui s’accorde quand l’objet est placé avant ! En visite en Italie, il avait découvert cette complication et il a cru bien faire en l’appliquant en français. Voltaire, jamais avare de bons mots, aura deux siècles plus tard ce commentaire : « Clément Marot a ramené deux choses d’Italie : la vérole et l’accord du participe passé…Je pense que c’est la deuxième qui a fait le plus de ravages ! »

Autant savoir.

mercredi 27 août 2025

Bruxelles, la Senne et Baudelaire (1821-1867)

La Senne, la rivière qui était si belle du temps des Gaulois, a bien changé en 1864 quand Charles Baudelaire arrive en Belgique. C’est un cloaque dans lequel se déversent tous les égouts de la ville. Le poète la qualifie de « Seine obscène » et voici comment il la décrit :

« La Senne qui ne pourrait pas, tant ses eaux sont opaques, réfléchir un seul rayon du soleil le plus ardent… Elle sert de vidange aux latrines…Ce n’est qu’un excrément qui coule »

Ce sont des extraits du pamphlet intitulé « Pauvre Belgique » qu’il écrit durant son séjour de deux ans à Bruxelles.  Il mourra l’année suivante à l’âge de 46 ans, rongé par la syphilis. Dans ce texte, il vomit tout ce qui est belge.

Des habitants, il dit : « Tous les Belges, sans exception, ont le crâne vide »

Même opinion sur la bière bruxelloise : « Le faro est tiré de la grande latrine, la Senne ; c’est une boisson extraite des excréments de la ville…Ainsi, depuis des siècles, la ville boit son urine. »

Et sur la propreté des demoiselles belges au « parfum de bélier » : « Elle puait comme une fleur moisie… »      

                             

Ce ne sont pas les plus beaux écrits de Baudelaire, loin de là. Mieux vaut ne retenir de lui que ses Fleurs du Mal avec sa célèbre introduction « Au lecteur » : c’est le poète maudit qui parle, le débauché mis à l’index qui a scandalisé les bien-pensants de son époque, il termine par ce vers interpellant : « Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère ! »

Autant savoir.

Basile, Basilique et basilic

Basile, vieux prénom qui revient à la mode, a une étymologie intéressante : il est dérivé du grec « basilikè » (> basileus = roi). Les « Basile » sont donc des enfants rois !

Ce mot grec est aussi à l’origine de la Basilique, nom donné à certaines grandes églises catholiques. Cela vient de l’antiquité romaine quand les premiers chrétiens ont transformé en lieux de culte des édifices prestigieux construits à la gloire d’un empereur et appelés « Basilica » (= bâtiment royal).

Basilique de Maxence et Constantin sur le Forum romain

Et plus étrange, le basilic utilisé pour le pesto vient également du grec « basilikè ». Les Anciens l’ont ainsi baptisé « plante royale » vu ses qualités gustatives et sa large utilisation dans la cuisine méditerranéenne.

Chaque année au mois de juillet, dans la ville de Tours, a lieu une foire dédiée au basilic. De nombreux producteurs viennent y présenter les différentes variétés, car il y en a beaucoup et parmi celles-ci, il y en a une appelée « saint Basile ».

Autant savoir.

 

dimanche 24 août 2025

Le rouge-gorge et ses légendes

Il existe de nombreuses légendes qui expliquent l’origine de la couleur de notre rouge-gorge, hôte familier de nos jardins. La plus connue fait référence à la mort de Jésus sur la croix. La voici, extraite du site « Feliphoto » sur Internet :

« Il y a fort longtemps, ce n'était qu'un modeste oiseau au plumage brunâtre. Alors qu'il voletait, il s'approcha du Christ crucifié sur sa croix. Il se posa sur son épaule, de ses ailes, il essuya ses larmes, et de son bec, il arracha les épines qui lui blessaient la tête. Une goutte de sang tomba sur sa gorge, colorant à jamais son humble plumage ».

Une autre version est un clin d’œil à la mythologie grecque : ce ne serait pas le Titan Prométhée qui aurait volé le feu aux dieux pour le donner aux humains mais pour bien le rouge-gorge et c’est en le transportant que les plumes de sa poitrine ont roussi…

En Angleterre, on raconte qu’à Noël, ce petit oiseau a voulu raviver les braises du feu dans l’âtre et en rendant ainsi service, il s’est brûlé tout l’avant du corps.

Pour les Irlandais, le rouge-gorge transporte les âmes des défunts vers l’au-delà. Et bien sûr, il est interdit de le tuer. Un fermier ayant occis ce petit volatile a vu sortir du pis de ses vaches du lait rouge…

Dans les pays de l’Europe de l’Est, il est considéré comme un porte-bonheur : quand on l’aperçoit, c’est le signe d’une nouvelle heureuse.

Autant savoir.

 

jeudi 21 août 2025

Le français, langue animale


C’est incroyable le nombre d’expressions françaises qui font référence à la gent animale. A titre d’exemple, je me suis amusé à écrire ce texte un peu loufoque avec 45 fois le nom d’un animal !

« Voici l’histoire, pas piquée des hannetons, d’un ours mal léché qui a été payé en monnaie de singe. Avec son œil de lynx, il n’était pas myope comme une taupe, mais rusé comme un renard, fier comme un coq, têtu comme une mule, malin comme un singe, fort comme un bœuf et doux comme un agneau.   

Chaud lapin, il a une faim de loup. Frais comme un gardon, il roule des yeux de merlan frit, il y a anguille sous roche, il fait le pied de grue mais il n’y a pas un chat, il est fait comme un rat, c’est le dindon de la farce ; elle lui a posé un lapin, elle l’a traité comme un chien. Elle avait pourtant du chien mais c’est une peau de vache ou une tête de linotte qui avait d’autres chats à fouetter. Il en est resté muet comme une carpe et rouge comme une écrevisse.

Mais revenons à nos moutons, arrêtons de nous regarder en chiens de faïence, de faire la poule mouillée, de sauter du coq à l’âne pour noyer le poisson ou tirer les vers du nez. Inutile de verser des larmes de crocodile, de monter sur ses grands chevaux ou gueuler comme un putois, ce n’est pas le chant du cygne, il faut prendre le taureau par les cornes sans faire la fine mouche pour finalement être copains comme cochons, serrés comme des sardines avec une fièvre de cheval qui fait dormir comme un loir… »

Autant savoir.😉

  

mardi 19 août 2025

Jeter le bébé avec l’eau du bain

Cette tournure est d’origine anglosaxonne. On la trouve pour la première fois dans un texte allemand de 1512 : « Das Kind mit dem Bade ausschüten » et les Anglais l’adopteront et la traduiront en « To throw the baby with the bathwater ». Elle n’apparaîtra en français qu’au XXème siècle sous sa forme négative : « Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain », c’est-à-dire qu’on ne doit pas en éliminant un problème perdre l’essentiel.

Expression bizarre qui fait référence aux habitudes d’hygiène de jadis dans les milieux populaires. Le bain n’était au mieux qu’hebdomadaire et par économie, il servait à toute la famille : le père d’abord suivi de ses fils puis la mère et les filles. Le nouveau-né arrivait en dernier, et on pourrait, par inadvertance, l’oublier dans cette eau plus vraiment claire.

Et cette formulation imagée et amusante a été adoptée par presque toutes les langues européennes : « Het kind met het badwater weggooien » en Flandre, « Buttare il bambino con l’acqua sporca » en Italie et en Espagne « Tirar el niño con el agua de bañarlo ». Selon le site internet « expressio.fr », cela se dit de la même façon en suédois, polonais, roumain, hongrois…

Autant savoir.

dimanche 17 août 2025

« Peter les plombs »

Expression à la mode souvent utilisée en justification de tous les débordements d’humeur : un court-circuit dans le cerveau ! Une sorte d’excuse pour des gestes inconsidérés quand on est dans une colère noire.

C’est tout le contraire du « self control » britannique ou de la retenue chère aux Nippons. De nos jours, beaucoup de nos contemporains ont besoin de se défouler quand ils sont contrariés et ne s’en privent pas. En oubliant que la colère est toujours un signe de faiblesse : cela veut dire que la situation vous échappe …  

Il faudrait sans doute remettre à l’honneur le beau poème « If » de Rudyard Kipling (1865-1936) dont voici un quelques strophes traduites en français :

Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie                         
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir (…)

Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles
Sans mentir toi-même d’un mot (…)

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage,
Sans être moral ni pédant (…)

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis,
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire
Tu seras un homme, mon fils.

Autant savoir.

lundi 11 août 2025

Mots français désuets

Certains mots sont rarement utilisés, ils sont passés de mode. Le langage est édulcoré pour ne pas heurter la sensibilité. En voici quelques exemples.

Le voyou se fait rare au profit de récidiviste, délinquant, individu bien connu des services de police. De même qui emploie encore le terme vandale ? Il s’agit maintenant de jeunes ou de travailleurs en colère voire de gilets jaunes. On ne parlera plus de vol mais de détournement de fonds, de home jacking, d’enrichissement personnel. Et quand un suspect est arrêté, il n’est bien sûr pas coupable, mais présumé innocent, tout au plus mis en examen.

Ne dites plus pauvre, mais défavorisé, exclu, laissé pour compte, SDF. La servante ou bonne de jadis est devenue employée de maison ou auxiliaire de vie. Quant au domestique, c’est l’homme à tout faire. L’instituteur lui aussi tend à disparaître. On dira professeur des écoles et professeure des écoles pour l’ancienne maîtresse, à ne pas confondre avec l’amie du mari.

Des patriotes, il n’y en a plus. Le vocable n’est plus utilisé que pour les missiles américains. Et il est inconvenant de parler de race et de noirs, ces termes ont fait place à appartenance ethnique et gens de couleur. La morale a disparu elle aussi, on n’ose même plus y faire référence. Sinon, on est qualifié d’extrême droite. Au Collège, c’est quelque chose comme l’éducation à la citoyenneté.

Où sont nos vieux ou vieillards d’antan ? Oubliés, les voilà maintenant du troisième âge ou seniors, rarement personnes âgées. Et on évitera de les dire malades s’ils sont en mauvaise santé. Et quand la fin de vie est proche, ils ne sont pas mourants mais en phase terminale, éventuellement à la suite d’une longue maladie. D’ailleurs, il n’y a plus de morts mais des décédés ou mieux des disparus ou encore ceux qui nous ont quittés.

www.autantsavoirdejo.be

L’exécution de Sacco et Vanzetti, erreur judiciaire ?

Dans la nuit du 22 au 23 août 1927, sont exécutés sur la chaise électrique, dans une prison près de Boston aux Etats-Unis, Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, reconnus coupables de deux assassinats.

A l’issue d’un long procès, ils sont condamnés à la peine capitale en juillet 1921. Mais une campagne médiatique en leur faveur est lancée, un peu partout des comités de défense tentent d’intervenir. L’exécution sera plusieurs fois ajournée. Un détenu déjà condamné pour homicide se déclarera coupable de ces assassinats mais rien n’y fera. Ils n’échapperont pas à la chaise électrique.

Dans le monde entier, ils sont devenus le symbole de l’erreur judiciaire. Un film sera consacré à cette affaire. De nombreux poètes et chanteurs ont célébré leur mémoire. Dont Joan Baez en chanson avec ce refrain lancinant sur une musique de Ennio Morricone :

 « Here's to you, Nicola and Bart / Rest forever here in our hearts / The last and final moment is yours / That agony is your triumph »

En 1977, cinquante ans après leur supplice, le gouverneur du Massachusetts les réhabilitera officiellement.

Et pourtant, était-ce vraiment une erreur judiciaire ? Un peu avant de mourir, Fred Moore, l’avocat des condamnés, aurait reconnu que Sacco et Vanzetti étaient effectivement coupables. Il avait fabriqué de faux indices pour faire réagir la presse et l’opinion publique…

Autant savoir.

 

 

jeudi 7 août 2025

Lorelei

 « Et la vague engloutit bientôt / Le batelier et son bateau… / C'est ce qu'a fait au soir couchant / La Lorelei avec son chant ».

Ainsi se termine le poème publié en 1824 par l’écrivain allemand Henrich Heine qui, comme beaucoup d’artistes, a été inspiré par la célèbre légende de la Lorelei.

En amont de Coblence, le Rhin a dû creuser son lit dans les montagnes, le cours est sinueux, le courant est violent et l’on dit que l’écho entre les falaises s’y répète sept fois. Jadis, ce passage était périlleux pour les mariniers. Selon la légende, Lorelei est une belle jeune fille aux cheveux d’or qui, assise sur un rocher, chante magnifiquement. Les navigateurs envoûtés en oublient la dangerosité du fleuve et sont entraînés sur les récifs.

 C’est le mythe des sirènes d’Ulysse, version germanique.

La Lorelei, statue sur une île du Rhin à Sankt-Goarshausen

Le rocher de la Lorelei se trouve entre Bingen et Coblence, dans cette vallée aux multiples châteaux, le « Rhin romantique » classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Autant savoir.

 


mercredi 6 août 2025

Désastre, stress et détresse

Pas de panique, ce n’est qu’un peu de linguistique…

Le mot français « désastre » vient de l’italien « disastro » lui-même tiré de « disastrato » un terme d’astrologie qui veut dire « né sous une mauvaise étoile » d’où prédiction de malheur, de désastre ! L’origine est à rechercher dans le grec ancien : le préfixe dis + aster. Les Anciens observaient bien plus que nous la voûte céleste la nuit et étaient persuadés de l’influence des étoiles et planètes sur notre destin. L’astrologie n’est pas nouvelle.

La perspective d’un désastre peut générer du « stress », un raccourci de l’anglais « distress » qui en médecine indique la réaction d’un individu à une agression physiologique quelconque. C’est un dérivé l’ancien français « estresse » (< latin strictus = serré) ; en effet quand on est stressé, on a une sensation d’étroitesse, d’oppression … et si le malheur arrive, c’est la « détresse », un autre mot qui a la même origine.

Par ces exemples, on voit les interactions au cours de l’histoire entre les langues européennes issues du grec antique et du latin : expressions et vocables passent les frontières et leurs sens évoluent.

Autant savoir.


Pyjama et burkini

A la Belle Epoque, càd au début du XXème siècle, pour prendre des bains de mer, les dames de la bonne société portaient un pyjama . C’était ...